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Crise et mal-être agricole

Les nouveaux chiffres sur le suicide des agriculteurs confirment «l’effet crise»


Économie et gestion le 10/10/2016 à 18:25
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Le 5 octobre 2016, l’agence de santé publique a publié un nouveau rapport sur le suicide des agriculteurs, pour les années 2010 et 2011. Les nouveaux chiffres confirment l’effet des crises en élevage sur la surmortalité par suicide chez les agriculteurs.

Selon la nouvelle étude de l’agence de santé publique sur le suicide des agriculteurs, publiée le 5 octobre 2016, 166 agriculteurs et agricultrices (138 hommes et 28 femmes) se sont donné la mort en 2010. Et 130 en 2011 (115 hommes et 15 femmes).

Ces chiffres bruts sont alarmants. La profession agricole enregistre ainsi près d’un suicide d’agriculteur tous les deux jours. Comparés aux chiffres enregistrés pour l’ensemble de la population française, ces chiffres bruts montrent une surmortalité par suicide significative chez les hommes pour l’année 2010, de l’ordre de 20 %. (+20 %). Cette surmortalité par suicide était encore plus élevée en 2008 et 2009, les deux années étudiées lors de la première étude de l’agence publiée en 2013. « On avait également observé une surmortalité de +28 % en 2008 et de +22 % en 2009. Cette situation était intervenue dans un contexte de fortes contraintes financières subies par le monde agricole à la suite de la crise économique de 2008 avec de fortes fluctuations des revenus des agriculteurs exploitants. »

« Les secteurs d’activité qui présentaient une surmortalité par suicide en 2008 et 2009 étaient l’élevage bovins-lait et l’élevage bovins-viande. En 2010, seuls les éleveurs bovins-lait présentaient une surmortalité par suicide. En 2011, aucun secteur d’activité ne présentait de surmortalité par suicide », précise le rapport.

Mais pour l’année 2011, « l’étude ne montre pas d’excès statistiquement significatif ». Cependant, l’analyse par classe d’âge a montré que les exploitants agricoles âgés de 45 à 54 ans présentaient un excès de mortalité.

En clair, la crise des années 2009 et 2010 dans les filières d’élevage et plus particulièrement en production laitière a eu un effet sur la recrudescence des suicides chez les agriculteurs. Mais l’agence de santé publique nuance : « Surestimer l’impact des déterminants économiques sur la survenue des suicides pourrait occulter les autres facteurs de vulnérabilité inhérents à la profession. »

Les conditions de vie et de travail caractérisées par « de fortes contraintes physiques, de larges amplitudes horaires, une pression économique importante notamment via la dépendance directe des fluctuations des politiques publiques européennes, des contraintes environnementales et climatiques, ainsi que des événements sanitaires » restent des facteurs à prendre en compte. Sans oublier « un important isolement professionnel et social » subi par bon nombre de producteurs.

Reste que, paradoxalement, les conditions de vie sont aussi évoquées pour expliquer la « sous-mortalité » observée pour les autres causes de décès par rapport à ce qui est observé dans la population générale. Cela s’explique « par les spécificités du mode de vie des agriculteurs : une moindre consommation de tabac qui diminue le risque de survenue des cancers broncho-pulmonaire, des voies aéro-digestives supérieures et de la vessie ainsi que le risque de décéder par cardiopathie ischémique, un niveau élevé d’activité physique qui contribue quant à lui à réduire le risque de développer les cancers du côlon et les pathologies cardiovasculaires ».